Réveil comme un lundi pour la famille Tuvert. Le petit Johan se leva en premier, juste après son père Moritz. Il se préparait pour l’école avec une immense fierté : malgré son très jeune âge, il avait été repéré par M. Jourdain pour intégrer la prestigieuse Académie du Style-eau, la même qui formait les talentueux sculpteurs aquatiques. En voyant leurs visages ce matin, les yeux des deux garçons grossirent comme des ballons.
Quelques minutes après les deux premiers réveils, Lorine jaillit de ses draps. A peine plus âgée que son frère Johan, elle en était absolument différente. Lorine ne visait pas les académies, elle préférait le monde artistique. Dans ses yeux, le Terre ne tournait qu’autour des peintures : Rembrandt, Monet, Chagall, Carel Fabritius, Frida Kahlo… (la liste a été écourtée pour correspondre à la taille de l’histoire). Ce matin de décembre 2021, quelque chose de nouveau tapissait son doux visage.
Le petit dernier se réveilla ensuite, en compagnie de Scooby, le fox terrier, si content de retrouver le reste de la famille. Entre Stefan et Scooby, le lien était fusionnel, ils partageaient la même pièce de sommeil depuis l’arrivée de Stefan à la maison. Le dernier de la fratrie était trop jeune pour savoir ce qu’il voulait faire plus tard, peut-être vétérinaire ? Personne ne pouvait le savoir. Dans la nuit, Scooby était venu déposer des poils sur la bouche de Stefan.
De la petite troupe maintenant réveillée, il ne manquait que la mère, Claudie. Elle profitait encore des dernières minutes de sommeil bien méritées. Cheffe d’une importante structure pétrolière, elle ramenait l’argent au foyer et veillait à son bon fonctionnement. Autant dans son physique que dans sa vie personnelle et professionnelle, elle ne laissait rien au hasard. Tous les poils de son corps par exemple, étaient contrôlés de près : leur pousse était maîtrisée. Mais elle se réveilla avec une sensation d’inconfort entre sa bouche et son nez.
Avant de sortir du lit, elle ouvrit son radio-réveil. Sa station favorite Ritournelle FM diffusait en boucle la nouvelle du jour : « Entre la nuit du 14 et du 15 décembre, la France entière a été touchée par une terrible épidémie de moustache ». Croyant à une blague, elle se leva pour aller voir son miroir, qui ne trahissait jamais son image. Sous son nez trônait une moustache drue et noire, semblable à un sapin prêt à accueillir les décorations de fin d’année.
Cette miniature est inspirée de « la terrible épidémie de moustache de 1890 » de Plonk & Replonk (https://fromnewithlove.ch/wp-content/uploads/2018/05/e%CC%81pide%CC%81mie-de-moustache-A2-Villeurbanne-1200×830.jpg)